Les saisons changent : les nuits se refroidissent, la pluie devient plus fréquente et les signes annonciateurs de l’automne se confirment. C’est le moment pour de nombreux oiseaux migrateurs de reprendre leur long voyage vers les terres du Sud. Mais contrairement aux idées reçues, ce n’est pas le froid qui a déclenché leur départ, c’est avant tout la diminution de la durée d’ensoleillement.
La Camargue est une halte migratoire majeure : chaque année, plus de 150 000 oiseaux, principalement des canards et des oiseaux d’eau, transitant par cette zone humide d’importance internationale. Cette région se trouve sur l’un des principaux axes de migration entre le nord de l’Europe et l’Afrique, offrant des repos et de la nourriture aux migrants épuisés après la traversée du Rhône ou de la Méditerranée.
Les déclencheurs de la migration
La migration est un phénomène régulé par plusieurs paramètres naturels. Le plus déterminant est la luminosité : la baisse du temps d’exposition à la lumière modifie la production d’hormones, notamment la mélanine, poussant les oiseaux à entamer leur voyage.
Cette stratégie vitale leur permet de rejoindre des zones où les ressources alimentaires restent disponibles pendant l’hiver : eaux libres non gelées, insectes actifs, graines ou petites proies.
Des outils de navigation fascinants
Chaque espèce migratrice dispose d’un véritable arsenal d’outils pour s’orienter :
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Un compas magnétique : grâce à de minuscules cristaux sensibles au champ magnétique terrestre, les oiseaux peuvent déterminer leur position sur le globe.
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Des repères visuels : montagnes, fleuves et littoraux servent de guides tout au long du trajet.
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Un compas solaire ou stellaire : certains suivent la position du soleil le jour ou des étoiles la nuit.
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Et, selon de récentes études, une mémoire olfactive : certaines espèces reconnaîtraient les odeurs typiques des paysages traversés.
Escale aux Marais du Vigueirat
Cette période automnale marque aux Marais du Vigueirat un moment privilégié pour les amateurs d’ornithologie. Les marais deviennent une halte temporaire pour de nombreuses espèces rares, visibles seulement quelques semaines. Les vedettes de la saison sont les passereaux , souvent discrets le reste de l’année mais nombreux lors de la migration.
Observer ces voyageurs ailés exige de la patience et un œil attentif. Munis de jumelles et d’un bon guide ornithologique, les visiteurs peuvent surprendre des espèces présentes de toute l’Europe, filant vers les détroits qui leur ouvriront le passage vers l’Afrique.
Oiseaux à observer en automne et en hiver
Parmi les passereaux migrateurs les plus fréquents, on retrouve :
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Le Pouillot véloce et le Pouillot fitis ,
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Le plus rare Pouillot à grands sourcils , aperçu chaque année en petit nombre,
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Les Rougequeues à front blanc et Rougequeues noires ,
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Et les Gorgebleues à miroir , élégantes et colorées.
Avec l’arrivée de l’hiver, les marais accueilleront ensuite une multitude d’espèces aquatiques :
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Canard souchet , Nette rousse , Canard siffleur , Pilet , Chipeau , Fuligule milouin ,
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Mais aussi Foulques macroules , Grues cendrées , Vanneaux huppés , Milans royaux et Bécassines des marais .
Certaines de ces espèces sont déjà visibles, arrivant peu à peu au fil des jours.
Des migrations en mutation
Depuis quelques années, le réchauffement climatique modifie profondément ces grands mouvements migratoires. Dans les zones tempérées, l’hiver se fait moins rigoureux : l’absence de neige et de gel maintiennent les ressources disponibles. Résultat, certaines espèces deviennent migratrices partielles : seule une partie de leurs populations poursuit le voyage vers le Sud, tandis que d’autres choisissent de passer l’hiver dans le sud de la France, profitant d’un environnement désormais plus clément.
À l’inverse, certains canards hivernants autrefois très nombreux, s’établissent désormais plus au nord et deviennent plus rares en Camargue.
Ces dynamiques font de la migration en Camargue et des Marais du Vigueirat, un observatoire privilégié des changements climatiques et des cycles naturels de la biodiversité.